Liberté ...
Lorsque ma mère m'a inscrite à l'école catholique, elle me traînait tout le long du chemin, je disais que les sœurs étaient méchantes. Je ne me souviens pas vraiment de méchanceté mais plutôt de sévérité. Il y avait la sœur Marie Xavier avec ses gros sourcils noirs, elle criait et me faisait peur et la sœur Marie Christine que je trouvais gentille. Je n’ai aucun souvenir des autres, comme si elles n’avaient été que deux dans le pensionnat. Je crois que ce qui m’a traumatisée (c’est un grand mot), c’est le fait qu’on nous obligeait à faire la sieste, assises au bureau, la tête sur les bras, sur le pupitre. C’était une torture pour moi. Les plus petits dormaient dans des espèces de lits de camp, dépliés contre les murs.
Les seuls moments agréables étaient les récréations. J’avais une toute petite mallette en carton dans laquelle ma mère plaçait des victuailles, histoire que je ne meure pas de faim. J’y trouvais, le plus souvent, pain au chocolat ou brioche, orange pomme ou mandarine, banane (toujours en piteux état) ou quelque petit sandwich à la crème de gruyère. Je me souviens très clairement de ce moment privilégié où je m’asseyais sur un banc du préau, ma valise sur les genoux. Je ne saurais pas dire s’il s’agissait d’un goûter copieux ou du déjeuner de midi. Je penche plutôt pour le déjeuner car ma valise était toujours bien bourrée. Je n’ai jamais pensé à le demander à ma mère plus tard, maintenant il est trop tard…Donc, voyant mes larmes tous les matins, elle m'a alors inscrite dans une école laïque et je n'ai plus jamais pleuré avant d'y aller.
Quelques trente ans plus tard, j’ai inscrit mon fils dans ce même pensionnat, car il n’y avait pas de place dans le public et non par foi chrétienne. J’ai retrouvé l’intérieur des grandes salles, le préau, la cour de récréation et tous ces souvenirs ont surgi de ma mémoire. Bien sûr, on proposait une heure de catéchisme non obligatoire. Je l’ai laissé libre d’y assister ou pas, il avait sept ans (l’âge de raison, dit-on), il a choisi d’y aller. Bien que ce ne soit pas ma conviction, j’estime ne pas être obligatoirement dans le vrai et je pense que cela ne peut rien apporter de négatif (lorsqu’il ne s’agit pas de bourrage de crâne). Je ne l’ai pas fait baptiser, non pas parce que j’étais contre mais parce que je ne me suis pas donné pas le droit de décider pour lui. J’estime (et c’est mon avis personnel) qu’une religion mérite d’être choisie et non imposée, on ne la transmet pas avec ses gènes. Pour moi (et certainement pour beaucoup d’autres personnes), il vaut mieux se passer de l’église et être droit que se prosterner devant une croix pour faire pardonner tous ses méfaits…